Martin Bouygues prêt à porter plainte en cas d’interdiction de Huawei en France. Alors que le gouvernement reste encore assez flou sur sa décision envers l’utilisation de matériel du constructeur, le PDG du groupe Bouygues annonce « veiller d’une part à ce qu’il n’y ait pas d’impact financier négatif dû à des décisions qui ne nous appartiennent pas ».

En effet, suite à la publication des résultats financiers annuels du groupe, Martin Bouygues est revenu sur l’affaire Huawei. Pour rappel, les États-Unis soupçonnent, sans cependant apporter de preuves, le constructeur d’être un cheval de Troie pour Pékin. 

Suite à ces accusations dont Huawei s’est toujours défendu, le gouvernement français a promulgué fin 2019 la loi dite « loi Huawei ». Celle-ci va contraindre les opérateurs à demander l’autorisation de l’ANSSI avant de déployer un nouvel équipement ou logiciel. L’autorité a ensuite deux mois pour étudier les dossiers. Les opérateurs redoutent donc que l’ANSSI fasse traîner délibérément les dossiers pour ne pas avoir à refuser certains équipements de Huawei avant l’attribution des fréquences 5G qui devrait avoir lieu au printemps. En effet, dans le cas d’une interdiction de Huawei, les investissements dans les fréquences pourraient être revues à la baisse par les opérateurs étant donné la différence de prix avec les concurrents tels que Nokia ou Ericsson.

En France, SFR et Bouygues Telecom sont les deux opérateurs à déjà utiliser les équipements de Huawei pour leurs réseaux. Pour la 5G, Free a choisi Nokia pour construire son réseau et Orange a gardé ses partenaires historiques Ericsson et Nokia. Inquiet de la situation, le PDG du groupe Bouygues a donc averti l’État concernant l’éventuelle interdiction de Huawei pour bâtir son réseaux 5G « en tant que président du groupe Bouygues, je dois veiller d’une part à ce qu’il n’y ait pas d’impact financier négatif dû à des décisions qui ne nous appartiennent pas ; d’autre part à ce que l’on ne nous créé pas de désavantage concurrentiel ».

De plus, si le gouvernement prenait la décision d’interdire le constructeur chinois, les opérateurs ne devraient pas seulement choisir un autre fournisseur pour la 5G, ce qui augmenterait les coûts de déploiement, mais aussi changer tous les équipements 4G actuels fournis par Huawei. « Vous ne pouvez pas swaper de la 4G d’un équipementier sur la 5G d’un autre équipementier ; il faut les mêmes équipements sur les mêmes zones » a expliqué Martin Bouygues. Bouygues Telecom et SFR se retrouveraient alors fortement désavantagés par rapport à Free et Orange, pour des « raisons qui ne nous appartiennent pas ». 

Le PDG n’a pas souhaité donner de chiffres sur sur les conséquences financières d’une possible interdiction mais a indiqué « un réseau mobile performant en France, cela coûte entre 8 et 10 milliards d’euros« . Il a ensuite ajouté qu’en France, les équipements de Huawei sont utilisées dans les réseaux fixes chez tous les opérateurs et que « c’est une part majeure de leurs installations même si personne n’en parle. Il y a aussi du Huawei dans les futures voitures PSA, ainsi que chez Ericsson et Nokia, beaucoup… Le truc s’arrête où ? ». En cas d’interdiction, Martin Bouygues estime donc que les conditions d’attribution des fréquences 5G devraient être modifiées. 

Interrogé sur une possible poursuite judiciaire envers l’État, le PDG a répondu que pour le moment, « on discute entre gens civilisés » mais le directeur général adjoint de Bouygues Telecom, Didier Casas, a nuancé en indiquant que de potentiels recours pour « préserver ses droits » sont toujours possibles. 

Martin Bouygues a rappelé que l’opérateur a déjà failli mourir en 2012 après l’arrivée de Free sur le mobile et « je ne voudrais pas que cela soit à nouveau le cas. On y veillera évidemment » a t-il ajouté. 

Source : les Echos

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